Une étrange histoire de musc

Publié par Michka 75

Le sobriquet « muscadin » fut autrefois attribué par le peuple aux « petits maîtres » c'est-à-dire aux jeunes gens prétentieux et à la pointe de la mode. Pourquoi ce qualificatif ? Là, je tente une explication étymologique que je n'ai pas trouvée sur le net : peut-être se parfumaient-ils avec du musc, produit fort odorant et très prisé en cosmétique par la noblesse et la bourgeoisie.

Mais l'histoire du mot ne s'arrête pas là. Pour la connaître, il nous faut nous transporter à Lyon, dans les années 1789 - 93, pendant la Terreur. Les ouvriers de la soie, plus tard appelés « canuts », n'aimaient guère les commis envoyés par les gros négociants pour leur payer, très mal, leur travail. Ils se moquaient d'eux ouvertement en les traitant de « muscadins ». En 1789, les tensions prennent une tournure violente. Les ouvriers de la soie se soulèvent contre ceux qui les exploitent. Le premier échevin de Lyon, pour étouffer la sédition, envoie des hommes armés parmi lesquels sont enrôlés des commis de négociants. Ils sont accueillis avec des jets de pierres et des insultes tels le sobriquet de « muscadins ». Faute d'avoir réussi, l'échevin royaliste lève cette fois une milice à laquelle va se joindre en 1790 la garde nationale puis d'autres groupes locaux. Cette armée revendique alors le nom de « muscadins » comme le proclame leur chant : « Tremblez donc sacrés jacobins / Voilà voilà les muscadins ». A Paris, la Convention (Assemblée constituante) ne fait pas dans le détail : pour elle, les rebelles lyonnais sont tous des « muscadins ». Le mot va encore évoluer en 1793 où il désigne les étudiants et fils de marchands réfractaires aux mobilisations pour la défense de la patrie. Il a toujours une connotation péjorative. Pour finir, après la chute de Robespierre (1794), il est attribué à la jeunesse dorée royaliste qui chasse les Sans-culottes de Paris.

Mais tout cela nous éloigne beaucoup du petit muscardin (voir l'article en page ), homonyme de à une consonne près de « muscadin ». Leur point commun, nous l'avons souligné, est sans doute le musc que ces animaux secrètent par une glande et que les élégants « frimeurs » de jadis utilisaient comme parfum, symbole pour le peuple de la coquetterie et de la vanité des riches. A moins que, pour rafraîchir leur haleine, ils n'aient eu recours à ces pastilles aromatisées au musc appelées « muscadins », attestées dès le XVIe siècle.

 

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